Nicolas Hulot et Laurent Berger : « 66 propositions pour un pacte social et écologique ».

, par Michel DECAYEUX

Le Monde/le Figaro 5 mars 2019

Au nom d’une coalition inédite de 19 organisations, l’ancien ministre et le secrétaire général de la CFDT présentent un pacte visant à concilier transition environnementale et équité.

Représentant une alliance de dix-neuf organisations issues de la protection de l’environnement et du mouvement social, Laurent Berger, secrétaire général de la CFDT, et Nicolas Hulot, ancien ministre de la transition écologique qui a démissionné de son poste en août 2018, aujourd’hui président de la fondation qui porte son nom, présentent un projet « pour donner à chacun le pouvoir de vivre ». Celui-ci rompt avec la politique du gouvernement, sur fond de crise des « gilets jaunes » et de mobilisations pour le climat.

Vous présentez, mardi 5 mars, soixante-six propositions qui forment un « pacte social et écologique ». Qu’apportez-vous de plus dans le débat actuel sur l’enjeu climatique ?

Nicolas Hulot Notre alliance : cette coalition veut rendre définitivement indissociable l’enjeu écologique et l’enjeu social. Ce n’est pas un front de dénonciation, mais de proposition. Notre responsabilité, dans un contexte très tendu, au niveau national, européen et, plus encore, au niveau mondial, est de ne pas rester dans le constat, mais d’aller vers la construction, dans la proposition, d’additionner les intelligences et cesser de les opposer. Toutes les initiatives en cours, marches, mobilisation des jeunes, etc., sont autant de signaux positifs, incitatifs, à destination des politiques. Dans une démocratie qui fonctionne bien, il faut trouver une forme de synchronisation entre les aspirations citoyennes et la volonté politique.

Un dénominateur commun existe entre elles : la double soif de cohérence et de dignité. Ces mouvements posent des questions qui doivent être entendues, notamment la demande d’équité – que chacun prenne sa part à proportion de ses moyens –, et de dignité parce qu’il y a des injustices dont on s’est accommodé trop longtemps. Ce n’est plus possible dans un monde où tout se voit, tout se sait.

Laurent Berger A l’urgence écologique a répondu une ambition très faible. Le mouvement social, qui a bien d’autres causes, s’est cristallisé au départ sur la question de la fiscalité écologique. L’ambition sociale n’est pas antinomique du respect de l’environnement et de l’ambition écologique, et doit être au contraire construite de façon concomitante. Dans notre pacte, se retrouvent des organisations environnementales, des syndicats, des associations de lutte contre la pauvreté, sur le logement, de jeunesse et des mouvements d’éducation populaire.

Ensemble, nous voulons affirmer l’enjeu de la transition écologique. « L’Affaire du siècle » [quatre associations attaquent l’Etat en justice pour son « inaction climatique »], mais aussi la mobilisation internationale des jeunes, le 15 mars, et la marche du 16 mars pour le climat sont autant de raisons d’espérer. Ne lâchons rien, et même allons beaucoup plus loin sur la transition écologique. Elle contribue aux solidarités, à l’emploi, à la lutte contre la pauvreté. A la condition que l’on fasse les bons choix, notamment en termes de répartition des richesses, en termes de politique fiscale. Ce n’est pas ce qui se fait aujourd’hui.