La France, 9e puissance économique mondiale, selon le FMI

, par Michel DECAYEUX

le 12/04/2016 AFP/Le Fig. Eco.

Selon le classement de PIB en « parité de pouvoir d’achat », la France pèse pour 2,3% du PIB mondial. Calculé en « parité de pouvoir d’achat », le PIB de la Chine arrive en tête suivi des États-Unis, de l’Inde et du Japon. Avec cette méthode de calcul chère au Fonds monétaire international, la France arrive en neuvième position parmi les grands pays.

Contrairement à ce que l’on pourrait croire le Fonds monétaire international (FMI) répugne à établir le classement des économies. Autant le FMI ne cesse de calculer et de prévoir les taux de croissance annuelle de chacun de ses 188 pays membres, autant l’idée de les ranger entre eux en termes de poids relatif, du premier au 188e, le fait hésiter : ce serait bien peu diplomatique ! Ce classement n’apparaît donc jamais sur le devant de la scène, même s’il existe bien évidemment. Ce n’est que de façon incidente que les experts de Washington l’écrivent donc noir sur blanc dans leur nouveau rapport sur l’économie mondiale, le World economic outlook, d’avril 2016 : « La Chine maintenant la plus importante économie du monde sur la base des parités de pouvoir d’achat est en train de vivre une transition essentielle mais complexe vers une croissance plus soutenable fondée sur la consommation et les services », peut-on lire.

L’euro place Tiananmen et avenue Montaigne

La Chine a donc bien le Produit intérieur brut (PIB) le plus « important », en « parité de pouvoir d’achat », précise le FMI, qui considère par ailleurs que ce concept est tout à fait significatif et particulièrement utile. Il part de l’observation qu’avec un euro ou un dollar, on achète plus de choses à Pékin qu’à Paris, essentiellement pour la raison que la main d’œuvre y est moins chère. Il est ainsi moins coûteux de se faire coiffer près de la place Tiananmen qu’avenue Montaigne. La « parité de pouvoir d’achat » des monnaies n’est donc pas exactement celle que font apparaître les cours des devises sur les marchés de change

C’est sur cette base que le FMI recalcule les PIB nationaux en « PIB corrigés des parités de pouvoir d’achat (PPA) ». Il ne s’agit pas de raffinements d’experts mais d’un exercice très concret. Cela permet en effet de donner une image plus réaliste de l’économie mondiale : en PPA le PIB mondial atteint 155.752 milliards de dollars, au lieu de 96.387 milliards de dollars quand on se contente de convertir les PIB nationaux aux taux de change des marchés. Le PIB en PPA donne une vue plus réaliste des conditions de vie et de richesse de l’ensemble des citoyens du monde. Le FMI accorde tellement de signification au PIB en PPA qu’il établit sa prévision de croissance mondiale, prévue à 3,2% en 2016, sur cette base. C’est le chiffre « officiel » auquel il accorde le plus d’importance, et le seul qui est discuté dans les réunions internationales et dont on parle dans la presse. Si la pondération des PIB nationaux se faisait sur la base des taux de change des marchés, la croissance mondiale ne serait que de 2,5%. Et pour une raison toute simple : les pays émergents pèseraient moins lourd, or ils continuent d’avoir des taux de croissance relativement plus élevés malgré leurs difficultés récentes.

La France derrière le Brésil et la Russie

Le classement de PIB en « parité de pouvoir d’achat » donne également un classement sensiblement différent. La Chine arrive donc en tête, pesant pour 17,1% du PIB mondial, suivie des États-Unis (15,8%), puis de l’Inde, troisième, avec 7% (du PIB mondial), le Japon est quatrième (4,3%), l’Allemagne cinquième (3,4%), juste devant la Russie, sixième avec 3,3%, puis le Brésil, qui malgré tous ses malheurs actuels est septième (2,8%), le Royaume-Uni venant en huitième rang (2,4%), la France neuvième (2,3%), le Mexique clôturant le top ten, pesant 2% du PIB mondial. Et encore ces chiffres sont-ils extraits d’un tableau du rapport du FMI publié mardi ne regroupant que les principaux pays de chaque continent. L’Indonésie n’y figure pas , or son PIB en parité de pouvoir d’achat dépasse celui de la France, ce qui relègue cette dernière en réalité à la dixième position. Rappelons que dans le classement des PIB calculés avec les taux de change des marchés des monnaies, la France vient au sixième rang derrière les États-Unis et la Chine, pratiquement ex æquo, suivis du Japon, de l’Allemagne et du Royaume-Uni, qui nous a ravi la cinquième place depuis 2014. Et l’Inde talonne désormais l’Hexagone.

Croissance mondiale : le FMI révise encore ses prévisions à la baisse

Pratiquement aucun pays n’est épargné, et surtout pas la France dont les prévisions de croissance 2016 et 2017 sont respectivement ramenées à 1,1% et 1,3% Sans surprise, car Christine Lagarde sa directrice générale avait préparé le terrain, le Fonds monétaire international (FMI) a une nouvelle fois revu à la baisse ses prévisions de croissance mondiale. Au lieu de 3,6% qui avaient été prévus en octobre dernier, le PIB (produit intérieur brut) de l’ensemble des 188 pays membres de l’organisation financière internationale ne progressera que de 3,2%. De même pour 2017, le FMI a ramené de 3,8% à 3,5% son pronostic d’expansion. « La croissance mondiale continue, mais à un rythme de plus en plus décevant, qui laisse l’économie mondiale plus vulnérable à des risques baissiers », a commenté Maurice Obstfeld, le conseiller et directeur de la recherche économique du FMI, lors de sa traditionnelle conférence de presse. Ces chiffres peuvent paraître à première vue relativement satisfaisants en soi, mais compte tenu du rattrapage structurel des pays émergents ou en développement, on estime qu’en deçà d’un taux de croissance de 2% à 2,5% mondial, un ralentissement supplémentaire déboucherait très vite sur une récession.

1,1% de croissance pour la France

Les deux blocs, d’un côté les économies avancées et de l’autre les émergents, connaissent une baisse de régime similaire. La France se trouve parmi les pays les plus touchés par le ralentissement. Contrairement au message divulgué par l’Insee le mois dernier, l’économie française ne devrait pas connaître d’accélération cette année : son PIB progressera de 1,1% en 2016 comme l’année précédente, et ce sera guère mieux en 2017 (1,3%). Ces nouveaux chiffres du FMI placent à nouveau la France en dessous de la moyenne de la zone euro et de l’Allemagne, qui l’une et l’autre peuvent espérer une croissance de 1,5% et 1,6% respectivement en 2016 et 2017.

Pétrole : l’effet négatif l’emporte

C’est en réalité au moins la quinzième fois consécutive que le FMI révise à la baisse ses diagnostics qui sont établis deux fois l’an, en avril et en octobre, avec des réajustements intercalaires en juillet et en juin. Mais comme dans une gravure d’Escher qui donne l’impression que les escaliers descendent sans fin, grâce à des trompe l’œil, les estimations du FMI de l’année en cours ne cessent d’être abaissées… par rapport aux prévisions d’amélioration sans cesse démenties sur l’année à venir. Ainsi des espoirs qui avaient été mis sur la baisse du pétrole et des matières premières se sont révélés largement illusoires. « Alors que les pertes des exportateurs auraient dû se traduire par des gains symétriques pour les pays importateurs, en pratique ce sont les effets négatifs sur les producteurs qui dominent », explique Maurice Obstfeld. Et l’économiste en chef du Fonds d’évoquer le précédent déflationniste sur les matières premières des années 1929-1939. Paradoxe chinois

Le FMI ne cache pas un certain désarroi face aux multiples incertitudes venues de tous les horizons. « Les risques qui nous concernent le plus sont les risques financiers et les risques d’origine non économique », explique Maurice Obstfeld. D’un côté la volatilité extrême des marchés financiers depuis le début de l’année, et de l’autre l’instabilité du Moyen-Orient, avec les réfugiés de Syrie, mais aussi le Brexit britannique. « Le consensus politique qui avait soutenu le projet européen est en train de se lézarder », s’inquiète l’économiste. Paradoxalement la Chine, qui depuis l’été 2015 suscite les craintes récurrentes des marchés financiers, est pratiquement le seul grand acteur dont les prévisions de croissance ont été relevées de 0,2 point, à 6,5% en 2016 et 6,2% en 2017. Cela « reflète la résilience de la demande intérieure chinoise, spécialement la consommation » expliquent les experts internationaux. Mais la bonne fortune chinoise, pour le moment, et plus encore celle de l’Inde, ne sauraient compenser les profondes récessions qui frappent le Brésil et la Russie, les deux autres membres des Brics.

Pour la énième fois les économistes du FMI, à l’instar de leur directrice générale, en appellent à toute une panoplie de mesures ultra classiques : expansion monétaire des banques centrales, réformes structurelles des marchés du travail et des produits, relance budgétaire dans les pays qui ont des marges à cet égard, comme l’Allemagne. Seul le ton tend à se dramatiser. « Avec des risques baissiers, les perspectives actuelles sur la croissance en appellent à une réponse immédiate. Il n’y a pas de place à l’erreur », insiste Maurice Obstfeld.