AMIENS Lee Cooper : reprise amère

, par Michel DECAYEUX

Le courrier Picard 10 Juillet 2010

Les délégués syndicaux s’attendent à des conditions de départ faibles

Le tribunal a tranché vendredi. La marque sera bien reprise par Linda Textile. Mais 76 personnes, dont 60 à Amiens, vont être licenciées.

« Malheureusement, c’est un triste constat, 76 personnes ne seront pas reprises. » Pour la présidente du tribunal de commerce non plus l’heure n’était pas au soulagement complet hier.

Après bien des péripéties usantes pour le moral des salariés, elle a finalement tranché : Lee Cooper France sera bien cédé à la société Linda Textile, acquéreur d’une licence d’exploitation de la marque pour 10 ans en France et 5 ans dans le reste de l’Europe.

Son dirigeant, qui n’a pas voulu s’exprimer, reprendra 47 salariés sur les 122 de la filiale française de jeans, dont 11 à Amiens. Au total, 76 personnes vont donc être licenciées, dont 60 employées sur la plateforme logistique d’Amiens. Comme Lee Cooper, Linda Textile possède aussi une usine en Tunisie.

« Les pouvoirs publics ne nous ont pas aidés à nous défendre »

Cette décision de la justice marque ainsi la dernière étape de « la lente agonie » de Lee Cooper, selon l’expression de la défense de la filiale. Placée en redressement judiciaire le 24 mars, la marque avait d’abord eu un espoir avec Verywear, un premier repreneur, qui s’est finalement rétracté au dernier moment faute de soutien de ses financeurs.

Cette fois-ci Linda Textile ne reprendra pour l’essentiel que des vendeurs et commerciaux. De son côté, l’administrateur judiciaire du tribunal aura un mois pour procéder aux licenciements. La plateforme logistique fermera. Seul un bureau restera à Amiens. Le siège de Lee Cooper sera transféré à Paris.

« On s’est battu de longues semaines. Il est important que Lee Cooper reste sur le sol français », cherchait à positiver Maître Yves Ardaillou, au soutien de Lee Cooper France. « C’est la fin de l’ère des financiers et le début de celle des professionnels de l’habillement.

Nous allons œuvrer pour que la saison d’hiver soit livrée », a assuré pour sa part Me Gilles Grinal, l’avocat de Linda Textile.

Nettement plus amère - « ça reste un énorme gâchis et une catastrophe » - ne pouvait que commenter Danièle Carlier, la secrétaire du comité d’entreprise. « J’ai 34 ans d’entreprise. J’ai vécu cette période où Lee Cooper comptait 1 200 salariés. »

« Les pouvoirs publics et les collectivités ne nous ont pas aidés à nous défendre », déplore toujours de son côté Jean-Luc Champion, délégué FO, remonté contre les actionnaires de Lee Cooper, un fonds d’investissement américain, « qui nous ont pompés d’une créance de 19 millions d’euros, alors qu’il nous suffisait d’un seul million pour redémarrer. »

À l’instar du tribunal qui a sollicité une expertise, les salariés vont se battre aussi maintenant pour obtenir la vérité sur certains flux d’argent. Pour ce faire, ils se sont montés en association pour entamer des procédures judiciaires le cas échéant.

D’ici là, ils se réuniront le 22 juillet pour être fixés en détail sur leur avenir, sachant que « le plan social qui se profile risque d’être à conditions très faibles », redoutent déjà les délégués syndicaux.