<Font color=black>La Chapelle aux Pots : Autoneum (ex Rieter) ; « On plongeait les mains dans les sacs d’amiante »

, par Michel DECAYEUX

le 16 décembre 2014 le Parisien

Michel Deleersnyder, l’un des ex-salariés de l’équipementier Rieter qui invoque « un préjudice d’anxiété »

HIER, DEVANT LE CONSEIL des prud’hommes de Beauvais, ils étaient seize salariés de Rieter, l’équipementier automobile racheté par Autoneum, à venir plaider le préjudice d’anxiété lié à l’amiante. .Certains ont passé l’intégralité de leur carrière à respirer de l’amiante sur le site de La Chapel1e aux-Pots (NDLR : la société compte aussi un site à Rémy et- à Ons-en-Bray). C’est le cas de Michel M., chimiste et technicien de contrôle matière première, et de Michel Deleersnyder, technicien de maintenance. Ce dernier, qui fut également délégué syndical FO, a été l’un des initiateurs de cette procédure juridique qui concernera au total soixante-. deux anciens salariés de Rieter

« Quand on y travaillait,’ nous n’avions pas conscience de la dangerosité de l’amiante, rappelle-t-il. On ne parlait pas de tout ça, même quand certains tombaient malades. Malis il y a eu des décès, notamment dus à des cancers. Aujourd’hui, il n’y a plus de doute sur l’origine des maladies. C’est pour ça qu’avec d’autres, j’ai lancé le collectif Kellamiante pour inciter les anciens salariés à attaquer la direction. Cette dernière conteste la réalité de l’amiante alors qu’elle nous a accordés, en 2000, des départs en préretraite à cause de cela. Pour dix ans d’exposition, j’ai pu partir à 57 ans au heu de 60 ans. " Il faut dire que chez Rieter, sur le site de La Chapel1 e - a u x - Pots - l’amiante faisait presque partie du décor.
 « Quand il y avait une fuite sur une machine, on plongeait les mains directement dans. le sac d’amiante pour en jeter par terre et absorber l’huile", raconte Michel Deleersnyder. Pour Michel M., l’amiante était carrément une matière première : « Elle faisait partie des composants du Blackson, un produit anticorrosif qu’on pulvérisait sur les pièces métalliques, précise-t-il. Je prenais de l’amiante à pleines mains pour la mélanger avec du bitume, des solvants. Nous mélangions tout cela avec un malaxeur en étant au dessus du cylindre qui contenait les produits. Nous avons également. fabriqué chez Rieter le produit vaporisé sur les poutres métalliques pour ralentir leur combustion. Ce produit était extrêmement riche en amiante. Evidemment, nous n’avions strictement aucune protection. Juste la blouse Rieter.

Quand nous voyons aujourd’hui que les gens chargés du désamiantage sont protégés avec des combinaisons intégrales, ça fait froid dans le dos. }) . A l’heure actuelle, les deux ex-salariés ont échappé à la maladie. Mais ils restent sous haute surveillance médicale. « J’ai cinq plaques pleurales de plusieurs centimètres, dont l’une est calcifiée, explique Michel Deleersnyder : Elles se situent au niveau des poumons et du sternum. Chaque année, je passé un scanner pour vérifier que tout évolue bien. C’est comme une épée de Damoclès, et à chaque rhume, je tremble. }) Les ex-Rieter devront patienter jusqu’au 22 juin pour connaître le délibéré de leur affaire. Me Barbara Vrillac, leur avocate, aime à rappeler que depuis le 19 décembre 2013, la cour d’appel d’Amiens (Somme) a, dans l’affaire BASF, « reconnu la> faute de l’entreprise au sujet de l’amiante sans avoir à prouver le sentiment d’anxiété ». L’avocate réclame 20 OOO€ par salarié.