Retraite des fonctionnaires : le cap des 60 ans est franchi

, par Michel DECAYEUX

LE 09/11 les échos

L’âge moyen de départ à la retraite a été de 60,2 ans en 2013.Les départs se font avant 60 ans dans la seule fonction publique hospitalière.

C’est une révolution entamée à grand bruit qui se poursuit maintenant à petits pas. Désormais, deux des trois fonctions publiques ont un âge moyen de départ en retraite qui dépasse 61 ans, selon le dernier projet de rapport annuel sur « l’état de la fonction publique ». C’était vrai depuis 2012 pour la fonction publique territoriale, où 87 % des agents partis à la retraite l’an dernier, avaient au moins 60 ans. C’est désormais aussi vrai pour les agents civils de l’Etat, où 78 % des nouveaux retraités de 2013 avaient au moins 60 ans. Du côté de la fonction publique hospitalière, l’âge moyen du millésime 2013 des pensionnés reste inférieur à 60 ans (58,9 ans). Mais le mouvement va dans le même sens. Est-ce parce qu’il est trop symbo¬lique ? Pas plus que les précédents, le dernier rapport de la fonction ¬publique ne donne l’âge moyen de départ à la retraite pour toute la ¬fonction publique. Mais il publie les données nécessaires au calcul. Il révèle que, pour la deuxième année d’affilée, cet indicateur a dépassé les 60 ans, à 60,2 ans.

62 ans pour les « sédentaires »

La progression de un à trois mois constatée en 2013 dans chacune des trois fonctions publiques apparaît très limitée au regard du bond fait entre 2011 et 2012, où l’âge moyen avait gagné de deux à trois ans. Mais cette hausse était largement un effet d’optique : la fin programmée mi-2011 du régime très favorable aux mères de trois enfants ayant travaillé au moins quinze ans dans la fonction publique sans condition d’âge avait conduit nombre de femmes loin des 60 ans à partir sans attendre. Subsiste une ¬constante spécifique du régime des fonctionnaires : les catégories dites « actives » (opposées aux « sédentaires ») qui occupent des emplois jugés pénibles ont le droit de partir avant 60 ans et bénéficient de validations gratuites de trimestres d’activité. Ils sont actuellement un peu plus de 700.000 en poste, dont 70 % dans l’hospitalière. « A la fin de 2013, dans les trois versants de la fonction publique, ces personnels partent en moyenne à 57 ans », note le rapport annuel. Le poids de ces catégories est particulièrement fort dans les hôpitaux, avec 54,3 % des départs l’an dernier contre 24,2 % à l’Etat et 18,3 % dans la territoriale. Chez les « sédentaires », l’âge moyen de départ en retraite rejoint celui du secteur privé, à plus de 62 ans dans l’Etat (62,1) et la territoriale (62,2) et à 61,7 ans dans les hôpitaux. Un autre élément a joué à la baisse sur l’âge moyen de départ à la retraite : l’élargissement, en 2012, des conditions de départ anticipé pour carrière longue. Il a réduit légèrement l’âge moyen de départ en 2013, comme dans le privé. Une mesure dont la portée est à relativiser : seuls 10 % de ses bénéficiaires sont partis avant 60 ans, cet âge charnière ¬concentrant le gros des départs. Le résultat de ces évolutions a un impact certain sur la pyramide des âges de la fonction publique, qui s’aplatit de plus en plus. « A la ¬différence du privé, le système de ¬carrière dans la fonction publique conduit, en règle générale, à une plus grande ¬stabilité de l’emploi et donc au maintien dans l’emploi des seniors », souligne le rapport

La retraite anticipée des agents en catégorie active coûte plus de 2 milliards d’euros ; Mais la supprimer ne générerait pas d’économies, selon un rapport du Sénat

Policiers, gardiens de prison, infirmiers, pompiers, douaniers... tous ces agents classés dans la catégorie dite « active » de la fonction publique peuvent partir à la retraite plus tôt que les autres, dès 57 ans ou même 52 ans, selon les professions. Pour la première fois, Bercy a chiffré, à la demande du Sénat, le coût pour les finances publiques de ces départs anticipés. Si l’âge légal de la retraite était relevé à 62 ans pour ces fonctionnaires, l’Etat et la caisse de retraite des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers économiseraient 2,3 milliards d’euros par an, apprend-on dans un rapport d’information de la commission des Finances du Sénat. En supprimant les bonifications de pension attribuées à certains d’entre eux (les policiers en particulier), l’Etat économiserait 1,6 milliard de plus.

Voilà pour la théorie. En réalité, le gain net serait bien plus faible. « Une telle réforme pourrait même se traduire par un coût global net pour les finances publiques », explique l’auteur du rapport, le sénateur UMP Francis Delattre. D’abord, elle aurait pour conséquence d’augmenter la masse salariale de l’Etat, des collectivités et des hôpitaux. Retarder le départ en retraite « implique le non-remplacement d’un agent senior par un agent jeune », observe le sénateur. « Or les fonctionnaires en fin de carrière ont une rémunération moyenne plus élevée que ceux en début de carrière. » Ensuite, le maintien des effectifs peut venir « contrarier » des programmes de suppressions de postes dans certaines administrations. Enfin, les pensions des anciens fonctionnaires étant calculées sur leurs six derniers mois de salaire, plus ils partent tard en retraite, plus leur pension sera élevée.