Le CE de Continental CLAIROIX vend son trésor de guerre

, par Michel DECAYEUX

Le parisien 16.10.2010

Propriétaire de 30 ha de forêt, le comité d’entreprise du géant du pneu met en vente son patrimoine pour 400 000 €.Un enjeu à quelques jours de l’élection des membres du CE.

Trois étangs et même une forêt… Le comité d’entreprise de Continental possède un immense terrain de 30 ha sur la commune de Saint-Léger-aux-Bois. Un espace destiné aux loisirs des salariés du groupe de pneumatiques, puisque 220 d’entre eux y viennent régulièrement pêcher ou même chasser. Avec la fermeture de l’usine, le CE veut mettre en vente ce terrain au plus vite, afin d’en reverser le bénéfice aux salariés.

Il organisait, hier, une réunion extraordinaire à ce sujet. « Six élus syndicaux étaient présents sur huit. Nous avons voté à l’unanimité une délibération pour que les étangs soient vendus au profit des salariés licenciés.

Même ceux qui ont retrouvé un emploi depuis la fermeture de l’usine vont pouvoir en profiter », affirme Antonio Da Costa (CFTC), secrétaire du CE. Un acheteur potentiel aurait déjà été trouvé et aurait proposé 400000 €. Un appel d’offres a été lancé pour faire éventuellement monter les enchères et les candidats au rachat ont jusqu’au 8 novembre pour déposer un dossier.

Seule condition pour le futur propriétaire : permettre aux Conti de continuer à profiter gratuitement du terrain, au moins jusqu’à fin 2011, terme du congé de mobilité.

De son côté, la direction de Continental, qui n’est pas propriétaire du bien, ne peut pas s’opposer à une vente. Mais elle souligne que rien n’est acté : « Nous nous sommes contentés de faire un rappel à la loi aux représentants syndicaux. Toute vente d’un bien appartenant à un CE est soumise à une législation bien précise. On ne peut pas utiliser le fruit de la vente en le redistribuant comme on le veut aux salariés », explique un porte-parole. Néanmoins, le comité d’entreprise affirme qu’il trouvera une solution pour distribuer le bénéfice aux salariés « conformément à la législation en vigueur ».

Cette vente fait toutefois grincer quelques dents. Pour Xavier Mathieu (CGT), l’un des deux délégués syndicaux qui n’ont pas pris part au vote, l’idée est louable, mais cache d’autres enjeux. « C’est normal qu’ils vendent le terrain. Sinon, c’est le CE de l’usine de Sarreguemines qui pourrait le récupérer. C’est normal aussi que les licenciés jouissent de l’usufruit. Mais je ne suis pas d’accord sur la méthode. Aucun salarié n’a été consulté. Et surtout, cette décision intervient quelques jours avant les prochaines élections au comité d’entreprise », ironise-t-il.

Des élections doivent en effet avoir lieu le 27 octobre, pour le renouvellement des mandats des représentants au comité d’entreprise. Cette vente avec la promesse d’une redistribution aux salariés pourrait-elle modifier la donne ? Une seule certitude, la bataille est déjà engagée par tracts et déclarations interposés. La tête du comité d’entreprise, malgré la fermeture de l’usine, attire toujours les convoitises.

« En ce moment, la direction se frotte les mains. Car pendant ces querelles dues aux élections au CE, il n’y a plus personne pour défendre les salariés », déplore Philippe Biernacki, délégué CFDT.