Montataire : Goss rachète… Goss pour licencier

, par Michel DECAYEUX

le 30.05.2013 Le Parisien

Le tribunal de commerce a jugé hier insuffisante l’unique offre de reprise de l’usine de rotatives de Montataire déposée par Goss International

« Goss à Montataire, c’est fini ! C’est clair », lâche Denis Tomczak, le délégué CGT de cette usine spécialisée dans les rotatives pour les journaux et l’imprimerie de labeur. A la sortie du tribunal de commerce de Compiègne, hier après-midi, c’est la consternation parmi les salariés de Goss présents à l’issue de l’audience.

Le tribunal devait en effet se prononcer sur l’offre de reprise de leur site et de celui de Nantes (Loire-Atlantique) présentée par… Goss International Corporation, la maison mère.

« Nous appartenons au groupe Goss France. En nous rachetant, il récupère tous les actifs de notre usine à un prix dérisoire », explique Jean-Yves, l’un des salariés. Pour l’occasion, même le PDG américain, Richard Nichols, a fait le déplacement. « Un million d’euros, c’est ce qu’il propose. Et il ne reprendrait que 50 salariés sur les 320 actuels à Montataire et 44 des 110 salariés de Nantes. C’est se moquer du monde », témoigne encore Jean-Yves.

Le tribunal a, lui aussi, jugé cette offre insuffisante et a décidé de maintenir la période d’observation jusqu’au 12 juin prochain, le temps pour le groupe multinational de revoir sa copie. « Mais il n’est plus question de la continuité de l’activité sur le site de Montataire », note le délégué syndical. En clair, le site de Montataire va fermer à terme. « Goss International veut garder uniquement des services. Ce ne serait même pas à Montataire, mais à 40 km, dans des locaux loués. »

Placée en redressement judiciaire le 3 avril dernier, l’usine de Montataire souffre de la crise que traverse la presse papier. « Pourtant, on avait les moyens de s’en sortir. Ou au moins d’arrêter en douceur. Là, c’est brutal », assure Denis Tomczak. Goss Montataire comptait, entre autres, sur une commande de 60 M€ de la société britannique Pole Star. « Mais on n’en entend plus parler ici. Ils veulent aller les faire fabriquer aux Etats-Unis », dénoncent les salariés.

Leur avocat, Roger Koskas, explique : « On assiste à la restructuration d’un groupe mondial qui refuse de payer les licenciements de ses salariés. C’est inadmissible. » « C’est bien ça la question, qui va payer ? Aujourd’hui c’est l’Etat français alors que Shanghai Electric (NDLR : unique actionnaire du groupe) pèse plusieurs milliards de dollars », se désole le délégué syndical. Le tribunal tranchera le 12 juin prochain. « Au final, c’est le savoir-faire français qui fout le camp », conclut un salarié, dépité.