Ouverture dominicale : Bricorama sous pression

, par Michel DECAYEUX

24.06.2012 Le parisien

Nouvel épisode dans la guerre opposant l’enseigne à FO. Le syndicat renonce à toute poursuite si Bricorama reverse les 20 M€ d’amendes aux salariés concernés. Ce que l’entreprise refuse. La guerre entre Force ouvrière (FO) et Bricorama continue. Alors que l’enseigne de magasins de bricolage a été condamnée en janvier à payer 20 M€ pour ouverture illégale le dimanche — après une plainte déposée, déjà, par FO — le syndicat revient à la charge. Jeudi dernier, FO a envoyé un courrier proposant à la société l’arrangement suivant : si Bricorama accepte de fermer, le dimanche, la trentaine de magasins qu’il ouvre habituellement ce jour-là, et que, dans le même temps, les 20 M€ d’amendes sont reversés aux salariés, le syndicat abandonnera toute poursuite. Et renoncera, par la même occasion, aux 20 M€ en question.

Jean-Claude Bourrelier, le PDG du groupe, ne l’entend pas de cette oreille. Lui espère bien qu’en appel, le 6 juillet prochain, le tribunal tranchera en sa faveur et annulera l’amende qu’il n’a toujours pas versée. « Nous ne sommes pas les seuls à ouvrir le dimanche, clame-t-il. Cela a toujours été comme ça. Cette attaque est vraiment irresponsable. » Car à entendre le PDG de Bricorama, les conséquences pour l’entreprise pourraient bien être « fatales ». « Si nous n’ouvrons plus le dimanche, nous devrons déjà licencier 500 personnes, explique-t-il. Ce jour-là, nous réalisons 15% de notre chiffre d’affaires. Ce serait nous tirer une balle dans la tête. »

Une concurrence déloyale

Pas question, donc, de fermer le dimanche. D’autant que, selon Jean-Claude Bourrelier, ses concurrents ne se gênent pas pour enfreindre la loi. « Leroy Merlin ouvre un magasin à Ivry-sur-Seine » (Essonne) alors que c’est illégal, affirme-t-il par exemple. Mais ce qui le gêne surtout, c’est la concurrence déloyale. Car si, dans la loi, les jardineries et les magasins d’ameublement ont désormais le droit d’ouvrir le dimanche, les textes sont plus réglementés pour les enseignes de bricolage. La loi Mallié a dessiné des zones, les fameuses Puce (périmètres d’usage de consommation exceptionnel), où l’ouverture le dimanche n’est possible que sur dérogation accordée par le préfet. « Les magasins Bricorama ne rentrent jamais dans ces zones, peste Jean-Claude Bourrelier. Nous sommes dans l’illégalité alors qu’à un ou deux kilomètres un Leroy Merlin ou un Castorama a le droit d’ouvrir sans problème. »

Pas sûr pour autant que FO prenne cet argument en considération. Le syndicat s’est en effet lancé depuis 2007 dans un combat contre les enseignes qui ouvrent illégalement le dimanche (voir encadré). « On a conscience que la loi est mal faite et que la concurrence déloyale existe, concède Françoise Nicoletta. Nous aimerions que le nouveau gouvernement la réforme ou l’abroge. » De son côté, la Fédération du bricolage devrait faire un lobbying intensif chez les parlementaires dans les jours qui viennent pour défendre Bricorama. Mais quoi qu’il arrive, le PDG ne veut pas lâcher : « Quitte à mourir, nous mourrons en combattant, c’est-à-dire en travaillant. »

Leroy Merlin et Castorama déjà épinglés Ce n’est pas une première. Avant Bricorama, Force ouvrière s’était déjà attaquée à d’autres grosses enseignes de bricolage pour défendre le repos dominical. Le plus gros coup du syndicat ? Probablement l’action menée contre Leroy Merlin en octobre 2009. A l’époque, FO et la CFTC parviennent à faire condamner le groupe à verser 7290000 € pour ouverture illégale le dimanche de trois magasins du Val-d’Oise. Même sort pour Castorama, toujours devant le tribunal de grande instance de Pontoise. En 2008, l’enseigne avait été condamnée à payer 100000 € d’astreinte pour chaque magasin ouvert un dimanche alors qu’elle n’en avait pas le droit